Action internationale RC Sion - Matériel pour ponts -Toni el Suizo

Monday, December 29, 2008


Des étoiles au-dessus de Yangon

18 de décembre, 2008

Il est deux heures du matin à Yangon, l'ancienne capitale du Myanmar. Les rues sont vides, il n'y a que moi qui suis en route avec mon vélo et ma sacoche pour aller dormir chez une famille birmane. La lune dorée et les étoiles se réfléchissent sur la surface lisse du Inya Lake et au loin apparaît la silhouette de la Shwedagon-Paya, la plus sacrée des pagodes pour les birmans.

Voici l'instant. Je m'arrête et je me tiens devant le lac, submergé de fatigue et des sentiments. Il y a des instants dans la vie qui nous relient avec le monde et l'univers, et celui-ci en est un.

"Merci" dis-je doucement, mais de tout cœur.

Aujourd'hui le premier container est arrivé par bateau depuis l'Italie avec des tuyaux Tenaris et nous l'avons déjà déchargé. Dans environ cinq heures, nous commencerons avec les travaux de soudure sur le premier pont pour la Birmanie, appelé aujourd'hui Myanmar, avec ma toute nouvelle équipe de soudeurs birmans, dans le chantier naval du gouvernement, au bord du fleuve Hlaing.

Sous le soleil de midi, donc exactement en ce moment même, de l'autre côté de la planète, en Équateur, Walter est en train de décharger 4 containers remplis de tuyaux Tenaris, en vue des 60 prochains ponts en Équateur. Il y a six mois, nous avions déjà reçu de leur part des tuyaux pour 30 ponts, dont Walter en a déjà achevés 14 - les 16 autres étant en construction.

Six containers supplémentaires sont en ce moment en haute mer, avec des plaques d'acier Ternium d'Argentine et des câbles des remontées mécaniques de la Suisse, en route pour le Laos et Myanmar. Et six autres containers sont en préparation, avec des tuyaux Tenaris supplémentaires du Brésil et encore plus de câbles d'acier en provenance de Houston et de la Suisse. Ainsi le résultat est que durant cette semaine, 400 tonnes de matériel offert se trouvent dans une phase ou une autre de leur transport. Et tout ceci va être mis en œuvre pour bien 90 ponts, qui vont servir à au moins 200'000 personnes en Équateur et en Asie. Rien que les dix ponts au Myanmar vont servir à environ 50'000 personnes.

"Merci, à vous tous", je redis encore une fois. M'entendent-ils en Suisse, en Argentine, Équateur, Brésil, Houston et dans tant d'autres endroits ? M'entendent-ils les enfants à Locarno et dans les autres villages et villes suisses, où malgré le froid, ils organisent des marchés de Noël et concrétisent d'autres idées, pour les ponts ?


Comment dire "merci" ?

Je sais de moins en moins comment dire "merci" pour tout ceci - et à tous ceux qui aident. Comment puis-je, par exemple en Équateur, mentionner l'énorme aide de la représentation locale de Tenaris, sans évoquer également l'agence en douane si serviable et le Ministère des Travaux Publics pour l'aide avec les procédures d'importation, et Holcim pour le ciment, et les gouvernements des Provinces pour les plaques en acier, le transport, campement de soudure, et et et…? Si déjà en Équateur je n'arrive pas remercier convenablement, alors comment dans tous les autres pays ?

Je me sens un peu comme les paysans - que ce soit au Viêt-Nam, Cambodge, Laos - qui visiblement émus une fois le pont achevé, me disent : "Nous ne savons pas comment vous remercier."

Mais à quoi bon en dire plus ? Le bonheur, c'est de voir les villageois travailler ensemble, avec des entreprises, des enfants, des membres du gouvernement, les médias, le militaire et des particuliers de bonne volonté - ensemble pour un but commun! Ensemble pour un pont de plus, ensemble, pour une souffrance en moins.

Ou comme Martha l'écrit, elle qui travaille à Radio Catòlica à Manabì en Équateur :

Encore et toujours je reçois des appels de villageois pour qui les ponts sont désormais utiles, et ils disent toujours que quand bien même ils ne te connaissent pas directement, ils te seront reconnaissants jusqu'à la fin de leurs jours. Que, malgré toutes les difficultés, ils ont appris qu'ils pouvaient réaliser de grands rêves grâce au travail en commun. Pas plus tard qu'hier, Francisco Otero m'a appelé (le contact pour le village de Andrecillo Adentro), tout remué parce qu'il n'aurait jamais pensé, comme il disait, qu'ils auraient leur pont, et encore moins qu'ils le construiraient de leurs propres mains. Que c'était un cadeau du ciel.

Je m'incline devant le ciel, et les hommes de bonne volonté. Ensuite je remonte sur mon vélo pour dormir au moins quatre heures. Car déjà aujourd'hui, le travail reprend. Et le travail, c'est ainsi que je l'ai appris, c'est l'amour en action.



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Toni el Suizo
Pontonnier


Traduction par: Jost von Reding